Des pistes pour vivre sereinement en étant présent à ce que l’on vit, un pas à la fois…
Depuis notre plus tendre enfance, « on » nous pousse à vivre en dehors du moment présent. Bien sûr, personne ne veut mal faire. Toutefois, on finit par vivre autant dans le passé, par nostalgie, que dans le futur, par peur que les expériences douloureuses ne frappent à nouveau à notre porte…
Pour sortir de ce labyrinthe existentiel, la pleine présence est une pratique qui permet de déployer tout son potentiel en choisissant ses états affectifs, malgré la tempête ou l’effervescence qui anime le moment. Dans les prochains mois, je donnerai 5 conférences publiques sur la pleine présence et la santé de votre cerveau, afin de vous exposer des moyens concrets pour que vous puissiez développer votre propre pratique, adaptées à vos besoins et votre réalité quotidienne.
La trame se tisse
Se sentir vu, entendu et reconnu, c’est une condition essentielle pour permettre à l’enfant de ressentir ses émotions dans l’espace sécurisant de la présence des adultes, parents ou enseignants. Plus tard, la sensation de bien-être et de confiance ressentie lorsqu’une personne significative nous regarde et nous reconnait dans ce que nous sommes est une condition de base pour être capable de se montrer sensible, vulnérable et entier devant l’autre.
Alors, pour pouvoir se sentir en sécurité auprès des adultes, de la fratrie et du cercle d’amis, les enfants développent des stratégies. Ce qui marche et ce qui ne marche pas. Ce qui produit tel ou tel effet. Et, certains apprennent rapidement que pour recevoir l’attention dont ils ont besoin, il est nécessaire de répondre aux besoins d’autrui. La trame se tisse.
Le psychologue André Duchesne expliquait que, lorsque nous étions des enfants, « nous avons appris à essayer ‘d’arranger’ nos figures parentales pour qu’elles soient suffisamment stables pour prendre soin de nous. Nous avons ainsi appris à écouter notre voix intérieure seulement pour la mettre au service des autres (ou contre les autres, donc encore en réaction). C’est une réaction viscérale qui ne peut être changée en intervenant seulement au niveau idéationnel ou comportemental. Sans une conscience corporelle des effets de l’agence, cette tendance continuera à se manifester. »
Somme toute, on apprend à se quitter et à échapper au moment présent trop douloureux sans support d’adultes bienveillants.
Les mécanismes de défense s’organisent
Notre détecteur de danger nous conduit à réagir avec agressivité ou à tenter de contrôler de nombreuses situations. Nous nous coinçons dès lors dans des luttes de pouvoir, oscillant entre les postures de la victime et du bourreau. Réactivant sans cesse nos blessures d’abandon et d’envahissement… Nous nous identifions à notre douleur et aux reflets d’autrui. Nous ne sommes plus nous-mêmes.
Bien sûr, il faut tenir compte des erreurs du passé, anticiper et planifier nos actions pour éviter de faire des choix risqués… Sans la mise en place d’une série d’étapes, il est rare qu’on atteigne ses objectifs. Toutefois, il est nécessaire de rester dans le moment présent pour saisir les opportunités et profiter de chacune des étapes du chemin que nous parcourons.
À contrario, certains se laissent envahir par une non-action totale, attendant que l’Univers ne pourvoit à leurs besoins et les conduisent sans efforts vers des cieux cléments. D’autres confondent l’abandon avec le lâcher prise. Dans un cas comme dans l’autre, ils se révèlent tôt ou tard déçus, car ils ont l’impression d’être passés à côté de leurs aspirations ou se coincent dans le syndrome de l’imposteur, car ils n’ont pas fait les efforts nécessaires pour développer leur potentiel.
Et si on tentait autre chose?
Alors, aujourd’hui, je vous invite à essayer de mettre un peu de folie dans votre vie! Je vous invite à imaginer que vous vivez – pour vrai – dans le présent. Que vous soyez présent à chaque chose que vous faites, chaque personne que vous croisez. Je vous invite à contribuer à un « vivre ensemble » plus sains et plus serein. Ce la repose sur un processus de désidentification qui, progressivement, va alors permettre de toucher une liberté intérieure.
En fait, cette dynamique repose sur l’utilisation optimale de la partie la plus humaine de son cerveau, c’est à dire le cortex préfrontal. Plusieurs écoles psychologiques considèrent la présence comme une nécessité pour déployer tout son potentiel humain. Et de plus en plus d’études en neurosciences exposent ses bienfaits, tant pour s’assurer d’un cerveau en santé que de réduire le risque des maladies liées au stress, à l’anxiété et à la dépression, voire la maladie d’Alzheimer…
L’essor de la pleine conscience
En vogue depuis quelques années, la pratique la plus connue est la mindfulness, qui repose notamment sur l’expérience de la pleine conscience telle que développée par Jon Kabat-Zinn. En Francophonie, c’est le psychiatre Christophe André qui a le plus documenté cette expérience de vie.
En 2010, ce pionnier expliquait que la « pleine conscience est la qualité de conscience qui émerge lorsqu’on tourne intentionnellement son esprit vers le moment présent. C’est l’attention portée à l’expérience vécue et éprouvée, sans filtre (on accepte ce qui vient), sans jugement (on ne décide pas si c’est bien ou mal, désirable ou non), sans attente (on ne cherche pas quelque chose de précis). »
Souvent associée à la méditation, la pleine conscience vise à développer les habiletés neurologiques contribuant à une qualité d’attention ouverte à l’instant présent, libre de toute forme de jugement d’autrui, dans une expérience sensorielle globale, plutôt qu’intellectuelle ou instinctive. Christophe André ajoute que « la méditation de pleine conscience n’est pas une pratique de relaxation. Elle consiste à être plus présent à soi et au monde, à se laisser envahir par les bruits et les odeurs de l’environnement ainsi que par ses propres sensations. »
Si on sait que le cerveau atteint sa maturité vers 40 à 45 ans, c’est parce que les études en neurosciences ont montré que le néocortex s’épaississait jusqu’au milieu de la quarantaine. Toutefois, des études récentes montrent que les méditants vont poursuivre encore quelques années ce processus, déployant encore plus leur potentiel humain.
Pleine conscience ou pleine présence?
La pleine présence et la pleine conscience sont, ces dernières années, de plus en plus confondues et, quelque part, proposent le même objectif: développer les habiletés nécessaires pour être présent, en paix et serein, dans les agréables moments, comme dans les situations complexes ou douloureuses.
Pourquoi est-il alors préférable de parler de pleine présence? En fait, il y a deux points majeurs: l’un est associé avec la manière dont les personnes perçoivent la spiritualité (qui peut faire partie de l’expérience, mais rebute certaines personnes blessées par les dogmes religieux) et l’autre est associé à la pratique méditative en position lotus (qui s’avère un frein pour certains praticiens). Avant de m’expliquer, je veux vous rassurer: je n’ai aucune intention de confronter les deux termes. Ils cohabitent paisiblement et c’est parfait. Toutefois, il est utile de comprendre pourquoi cette distinction a émergé ces dernières années.
D’une part, parce qu’on a parfois trop tendance à attribuer cette pratique aux orientaux et au New-Âge, alors que certaines traditions chrétiennes encouragent également l’expérience du moment présent, notamment par le chant de psaumes et la prière Unio Mystica. Le vrai sens du chapelet n’est pas la pénitence, mais l’état de communion avec le Tout. D’ailleurs, les neuroscientifiques Mario Beauregard et Vincent Paquette ont réussi à convaincre des soeurs carmélites de se prêter à des expériences dans un scanner pour voir comment leur cerveau fonctionnait alors qu’elles pratiquaient l’Unio Mystica.
Dans mon livre Ce que le cerveau a dans la tête, j’expose les points de ressemblances du fonctionnement d’un cerveau chez une personne qui médite ou qui prie. Ce qui confirme l’expérience clinique qui parle avant toute chose d’un état intérieur de paix, de joie et de présence à ce qui est, sans s’attacher à un de ces aspects. Les sensations sont alors ressenties autant pour accentuer l’expérience du moment présent que pour tempérer le détecteur de danger.
D’autre part, parce qu’il faut dégager l’expérience du moment présent de l’expérience de la méditation en position lotus. En effet, il y a plusieurs manière de méditer. On ne doit pas nécessairement être contemplatif. On peut, mais ce n’est pas obligatoire. Certaines personnes y répondent très bien, mais d’autres d’une manière pas vraiment satisfaisante. Je fais partie du second groupe. La méditation en position lotus n’est pas vraiment mon truc. Par contre, je recherche l’état méditatif en permanence.
Pour comprendre, laissez-moi vous raconter une petite histoire. Deux moines demandent à leur supérieur s’ils peuvent fumer en méditant. L’un reçoit l’autorisation, l’autre pas. Intrigué, celui qui s’était vu refuser sa demande questionne l’autre. Il répond « j’ai demandé si je pouvais méditer pendant que je fumais. » Le premier avait, pour sa part, exprimé « puis-je fumer pendant que je médite? »
C’est en comprenant cette petite histoire que j’ai pu apaiser, dans ma trentaine, ma réticence face à la méditation ou, plutôt, j’ai compris comment installer un état méditatif dans ma vie quotidienne. Pour paraphraser Osho, « l’important, c’est de marcher Zen, de manger Zen et de parler Zen. » Cela allait de soi dans ma pratique psychothérapeutique et cette pratique s’est installée dans ma vie de tous les jours. Quelque part, je peux faire une conférence, conduire ma voiture, rédiger un rapport ou participer à une réunion en étant dans un état méditatif ou, plutôt, de pleine présence. N’est-ce pas, d’ailleurs, l’objectif de l’un comme de l’autre?
Le concept de pleine présence va, également, rejoindre la compréhension psychodynamique de la psychologie humaine…
Être présent… un pas à la fois
Inspirée par la pratique psychocorporelle intégrative développée par Jack Rosenberg, la pleine présence en psychodynamique est la capacité d’attention soutenue à son expérience physique, émotive et énergétique. Bien ancré dans ses baskets (conscient de sa frontière entre ce qui est soi et ce qui est autrui), il s’agit d’utiliser les sensations corporelles, l’attention à ce qui est présent dans le ici-et-maintenant, sans nécessairement se couper de son mental.
En effet, cette faculté humaine n’est pas nécessairement un problème, c’est une ressource qu’il est nécessaire d’apprendre à apprivoiser. Souvent, nous l’utilisons pour intellectualiser, pour dramatiser le passé ou pour anticiper une situation douloureuse… Pourtant, la mentalisation est à la base des qualités humaines les plus nobles, y compris la tolérance, la compassion et la résonance empathique.
Les fondements de la mentalisation ont été développé par Peter Fonagy et Anthony Bateman. Cette démarche réflexive sur notre expérience affective est, selon mon expérience personnelle et clinique, tout autant nécessaire, car elle nous permet d’identifier les enjeux personnels et relationnels qui perturbent la qualité de notre vie dans le présent. On devient alors un observateur de ce qui se passe, conscient, mais pas envahi:
- il s’agit de comprendre les états émotifs et mentaux qui sous-tendent les comportements des autres;
- il s’agit de comprendre nos propres états émotifs et mentaux, afin d’agir avec intégrité et éthique.
Il s’agit d’activité réflexive qui permet de percevoir et d’interpréter le comportement en termes de pensées, de croyances, de motivations, de désirs, d’idéaux, etc. L’autre n’est plus perçu comme intentionnellement méchante, mais comme une personne parfois maladroite. Et cela permet aussi de relâcher la pression que nous nous mettons sur les épaules. Nous pouvons alors revenir dans le moment présent. C’est la porte nécessaire pour expérimenter la compassion autant pour autrui que pour soi-même.
Cinq conférences pour vous permettre de développer votre pratique
Je donnerai 5 conférences gratuites dans des événements qui auront lieu cet hiver et ce printemps 2019 au Québec: 7 clés pour un cerveau en santé et développer la pleine présence.
Nous aborderons des outils concrets pour vous permettre de développer votre propre expérience, qu’elle soit inspirée par la pleine conscience ou la pleine présence!
- Salon de l’Éveil de Laval – 16 et 17 février 2019 – Conférence dimanche 17 à 10h20!
- Salon de l’Éveil de Gatineau – 23 et 24 mars 2019
- Colloque Sciences et Culture de Mont-Laurier – 3 avril 2019
- Salon de la Neurodiversité de Montréal – 28 avril 2019
- Salon de l’Éveil de Lévis – 25 et 26 mai 2019
Au plaisir de vous y retrouver!
Joël Monzée, Ph.D.
Docteur en neurosciences, pédagogue et psychomotricien.
Accéder à des ressources gratuites:
- visitez la page ‘psychologie et neurosciences‘, dont les formations en ligne gratuites.
Pour en savoir plus sur les éléments abordés dans ce texte:
- J. L. Rosenberg, Le corps, le coeur et le Soi, Montréal, Eds Québec Amérique, 1989.
- J. Kabat-Zinn, Au Coeur de la tourmente, la pleine conscience, Bruxelles, Éds De Boek, 2009.
- P. Fonagy et A. Bateman, Mentalization based treatment for borderline personality disorder, World Psychiatry, 2010, 9(1):11-15.
- J. Monzée, Ce que le cerveau a dans la tête, Montréal, Eds Liber, 2011.
- J. Monzée, Dire OUI à la vie, Québec, Eds. Le Dauphin Blanc, 2013.
- Ch. André, Méditer, jour après jour, Paris, L’Iconoclaste, 2016.
- J. Monzée, J’ai juste besoin de votre attention, Québec, Eds. Le Dauphin Blanc, 2016.