Identifier nos défis quand les enfants et les ados confrontent notre autorité

Date

29.08.18

Nos enfants et nos ados nous poussent parfois dans les cordes. On essaie de maintenir le cap, mais on se fatigue. On se désespère. La désillusion affecte notre joie de vivre. Chaque jour, on gère, mais on n'en peut plus. On voudrait surtout que cela change. De là, nous avons deux choix: la lutte de pouvoir ou la bienveillance. Je vous propose la seconde option, pour plein de raisons...

Nous faisons tous des erreurs lorsque nous intervenons auprès des enfants ou des adolescents. Les identifier et transformer nos habitudes d’intervention est une source de bonheur pour tout le monde, tant pour vous que pour les jeunes que vous côtoyez. Je vous propose une série de questions pour vous permettre d’identifier vos défis quand votre jeune ou votre élève vous confronte à la maison, à la garderie ou à l’école.

ÊTRE ACCULÉ DANS LES CORDES

Vous connaissez sans doute l’expression: être acculé dans les cordes. Dans le monde de la boxe, c’est à dire que l’adversaire nous pousse tellement loin, qu’on est coincé dos dans les cordes du ring. C’est une réalité qu’on peut vivre autant dans notre famille qu’en milieu de la petite enfance ou les classes primaires et secondaires.

Le monde dans lequel nous vivons offre mille et une possibilités, autant vers le côté sombre que le côté lumineux de notre personnalité. La tradition orientale parle de la voie du chaos et de la voie de la sagesse. Ce choix est d’ailleurs très bien illustré dans les films de Star Wars avec, respectivement, le monde des Sith et celui des Jedi. Pour le socio-ethnologue Josef Campbell, c’est un archétype fondamental, car on le retrouve chez tous les êtres humains, quelle que soit sa culture, son époque ou ses défis.

Le psychanalyste Guy Corneau expliquait que l’autre était le meilleur acteur de soutien, alors que nous jouions le rôle principal de la pièce de notre vie. Il nous invitait dès lors à offrir « Le meilleur de soi » en identifiant nos enjeux et nos déclencheurs de réactions passives ou agressives. Comme chez les jeunes, notre détecteur de danger fonctionne en continu et il peut réagir, voire sur-réagir, lorsqu’un jeune confronte notre autorité parentale ou scolaire.

Somme toute, nous avons deux choix lorsque notre autorité est remise en question par un bambin, un enfant ou un ado: entrer dans une lutte de pouvoir ou identifier nos enjeux pour agir tant avec fermeté que bienveillance.

L’HUMILITÉ EST NÉCESSAIRE

Malgré un beau coffre à outils, je n’y échappe pas comme père et beau-père d’un enfant et de deux ados! Admettre qu’on peut se tromper est non seulement une marque d’humilité, mais surtout l’essence d’une démarche réflexive qui permet de devenir meilleur que la veille. Cela permet aussi de s’ajuster à l’évolution des dynamiques familiales.

Pas une semaine ne se passe à la maison sans que ma conjointe et moi ne prenions le temps de revisiter les événements des derniers jours. Elle a vu des choses que je n’ai pas vues, j’ai entendu des choses qu’elle n’a pas entendues.

Notre partenariat de parents s’en trouve à chaque fois renforcé, consolidant au passage la cohérence de nos interventions et la stabilité du milieu familial.

Éventuellement, je prends le temps de revenir sur une intervention que je juge maladroite avec l’enfant ou l’adolescent. Dans ma maison comme dans mon bureau. Par l’exemple, j’enseigne l’humilité et le droit à l’erreur.

Les enfants comme les ados apprennent plus par l’imitation que par l’intégration de nos conseils. Parfois, ils mimeront ce qu’ils voient à la télévision ou dans la cours de récréation. Vous en serez certainement surpris, mais dites-vous qu’ils valident auprès de vous le « vivre ensemble »sain et serein.

Si on s’installe dans les luttes de pouvoir, c’est ce qu’ils initieront dans les relations avec vous!

Si on s’installe dans une dynamique respectueuse et bienveillante (mais ferme et cohérente), ils peuvent accueillir nos consignes, se rebeller un peu (parfois beaucoup), mais ils savent au fond que vous le faites pour les aider à grandir. Petit à petit, ils vous imiteront et offriront le meilleur d’eux-mêmes!

LES DÉFIS AFFECTIFS

Nous cherchons tous à vivre des relations harmonieuses avec les autres, tout en ayant besoin de nous sentir des personnes à part entière, autonomes, préservant notre espace personnel, nos élans et nos inspirations. Il y a donc un mouvement de rapprochement vers les autres et un autre de séparation pour conserver notre autonomie et ressentir notre individualité.

Dans la vidéo gratuite « Le double défi de toute relation » , je vous partage comment ce double défi, commun chez tous les êtres humains, va venir fréquemment stimuler notre détecteur de danger.

En effet, si ce double mouvement n’est pas rencontré de manière saine et sécuritaire, des comportements dérangeants apparaissent. Ils sont le premier symptôme que la personne vit des difficultés qui, à termes, peuvent se transformer en troubles physiologiques et affecter tant la santé physique que celle de l’esprit. Cela fait partie des thématiques que j’aborde, avec mes collaborateurs, dans les livres « Devenir SOI » et « Dire OUI à la vie« .

En effet, le stress dû à l’impression de danger va acidifier le corps et réveiller les fragilités physiologiques qui agissent comme des terrains à la maladie. Et si un virus passe par là, il y a de fortes chances que notre système immunitaire soit moins efficace. Ainsi, identifier nos défis d’adultes pour mieux canaliser nos émotions va contribuer non seulement à des relations saines, mais aussi à notre santé physique.

Mais, il y a aussi les conséquences, tantôt positives, tantôt délicates ou souffrantes, de notre histoire… Depuis que nous avons été fécondés, nous vivons des émotions, des échecs, des défis et des réussites. Les uns comme les autres vont venir jouer dans la lecture des événements que nous rencontrons au quotidien. Identifier notre manière de voir et de vivre ces événements va nous aider à prévenir les réactions défensives pour privilégier la cohérence, la bienveillance et l’accompagnement sain. Somme toute, une manière de choisir le meilleur de nous-mêmes en relation avec les enfants et ados qui, parfois, nous poussent à bout!

QUELQUES QUESTIONS POUR IDENTIFIER VOS DÉFIS

Souvent, nous nous voyons comme « extérieurs » à la manière dont l’enfant ou l’adolescent agit ou réagit. Pourtant, nous sommes partie prenante de sa dynamique comportementale. C’est un des principes fondamentaux de la pratique systémique: nous sommes co-responsables de ce qui se passe à la maison ou dans la classe. Et si nous avons un peu de pouvoir sur ce qui se passe, c’est en prenant conscience de notre propre émotion et de nos propres espoirs, attentes et difficultés.

Rédigée avec la complicité de Ginette Lépine, voici une série de questions vous est proposée pour initier votre réflexion. Cette démarche réflexive va contribuer à votre sensibilisation quant à l’impact de ce qui se passe dans la famille ou dans la classe. En tant que parent ou intervenant, la résolution des problématiques de gestion émotionnelle des enfants et des adolescents passe par une meilleure compréhension de nos enjeux affectifs.

Prenez une feuille ou un cahier qui va vous accompagner dans les prochains jours. Lisez les questions et observez-vous.

Quel est mon regard face à ses comportements d’orgueil, de violence ou de rejet des enfants?
Quels sont mes enjeux relationnels qui me limitent dans mon rôle de parent, de professionnel ou d’enseignant?
Qu’est-ce que je connais de mes enfants ou de mes élèves en relation?
Comment est-ce que je peux mieux respecter les besoins fondamentaux des enfants?
Comment puis-je me respecter tout en répondant aux besoins fondamentaux des enfants?
Comment aider les enfants à vivre les émotions agréables et désagréables?
Comment puis-je mieux vivre le fait que mon enfant ou mon élève est hyperactif?
Comment est-ce que je peux mieux décoder le comportement défensif des enfants et agir de manière adéquate?
Comment puis-je mieux gérer mes émotions face aux enfants hyperactifs ou les comportements dérangeants des enfants?
Quels sont les habiletés que je peux favoriser chez les enfants pour leur permettre de devenir plus autonome?
Comment est-ce que je peux favoriser un meilleur développement du Soi chez les enfants pour leur permettre de vivre plus sereinement?
Comment est-ce que je peux mieux intervenir lorsque mon enfant ou mon élève vit des difficultés d’apprentissage?
Comment puis-je favoriser une communication non violente, tout en permettant les sentis corporels et les émotions?

N’hésitez pas à revenir plusieurs fois à une question ou l’autre, car votre démarche réflexive va vous permettre d’identifier des défis de plus en plus subtils. Après, il s’agit alors d’apprendre à prendre soin de vous pour réduire la sensibilité de votre détecteur de danger!